Exposition Roger PARRY, Musée de TAHITI & La Dépêche de Tahiti,

Regarde la machine à écrire: Que peux-tu lire sur la feuille ? Entre le désir et le coeur, il y a 6000 km de tristesse.

Ariirau.

 

MY DEAR MARY

 

LUI “My dear Mary, I am so sad since I left you behind. I love you so much, my darling, please forgive me, my sweet sugar of me. Our boat arrived at Papeete on the 19th of August. Indigeneous people…”

 

ELLE - …

 

 “…the harbour was crowded with them, kids and wives, they were dancing sensuously, they kissed us, they hugged us, they gave us flower lays. Indigeneous people here have no decency, I preach them God, try to make them understand, but they make no effort, or so little…”

 

- … Tahiti n’est pas un pays, qui se lève avec ses couleurs. C’est une terre ma’ohi qui se répand sur ses douleurs, en tranches épaisses de basalte pour empêcher que son chagrin ne vienne sous l’asphalte, y répandre son venin…[1]


“Mary I miss you so much, living that far away from you is unbearable, there is not a second of the day when you are not in my mind. I hope you take good care of yourself, my sweet sugar of mine. I keep your pink ribbon close to me.”

 

- Je suis née ici mais j’ai grandi ailleurs… je suis ici mais je reviens d’ailleurs… j’ai honte de ne comprendre que la moitié de ce que tu dis. Tu parles si vite que lorsque je déchiffre deux mots, tu en es déjà trois phrases plus loin et je suis perdue…[2]


 “I sewed it under my cap. You know, here, it’s hot, so hot, and I’m bored, so bored. I miss the kids, greet Pastor Fox for me, I keep a close hand on the bible he gave me before I enrolled the Navy. You know Mary, we, American people, can bring so much to those countries.”

 

- Je me suis brûlée l’âme à la flamme de notre amour. J’ai réchauffé mon corps à la chaleur de ta jeunesse, Papillon attiré par la lumière… Je hais ce papaâ sans nom et sans visage. Maigre oiseau blanc porteur de douleur…[3]


“There is absolutely nothing here to do, men here are so greedy, I would have never guessed that those Tahitians loved money that much. Women have no decency, they are dark skinned and quite unpretty, nothing that you could imagine, really…”  


Je hais ces hommes orgueilleux qui se croyaient les plus puissants … Plus d’enfants pour m’aimer, Plus de peuple pour m’accompagner, Auë, quelle douleur ! Je regarde mes enfants orphelins, Je regarde mon peuple déchiré, Je regarde mon corps dévasté.[4]


 “They let their kids do whatever they want, and young girls are uneducated and quite provocative with old Frenchies. Don’t worry Mary, I’ll always be faithful to you, you know me. You’re my wife, my one and only. I miss you so much, my sweet sugar of me.”

 

- Je pensais à mes ancêtres. A ceux qui avaient dû exister et que pourtant nous ne connaîtrions jamais. Avaient-ils été heureux ? … moi, j’eu ce sentiment qu’ils devaient, parfois,  se sentir dérangés puis dépassés par des regards venus d’ailleurs.[5]


“I can’t wait to leave this boring island, mosquitoes are all over the place. You know, I miss your cooking, Mary! Your pancakes, your meatloaf, your cheesecake! Ah Mary, here food is hardly eatable, I suspect the lack of hygiene in the restaurant kitchens, the captain warned us before...”

 

- Sache tout d’abord, que ton corps, c’est ton pays. Qu’il ne faut pas le soumettre au protectorat ou sous la tutelle de quiconque… personne ne te voit et encore moins cet homme… et si tu étais vivante, j’aurais eu tant d’amour à te donner…[6]


“ I pray for you Mary, I pray for us. If God sent me away from home for a while, there must be a reason to it. But I’ll be back home soon. Thinking of you helps me holding on. I love you dear, my Sweet darling. Love, always. Andrew.”

 

- Depuis cette mutilation, cet “arrache-tripes”, elle se sentait vide, vacante, vacuité… du vagin, de l’utérus, de tout. On lui avait tout enlevé, le cœur, les tripes… Les seins ont perdu de leur fermeté… son visage, surtout, avait changé. Elle était triste.

On aurait dit une chienne battue.[7]



[1] C’est une terre Ma’ohi.

[2] Lettre à ma Polynésie, Nouvelle Vague.

[3] L’île des rêves écrasés

[4] L’île des Rêves écrasés

[5] Mutismes

[6] Matamimi

[7] Je reviendrai à Tahiti.

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