vallee-crete.jpg

Elle se vêt de grandes étendues d’herbes, à la fois courtes et hautes, elle laisse ainsi le lit de rivière prendre le soleil sans ombrages, elle est beaucoup moins boisée qu’aujourd’hui. C’est une aubaine, avec ce soleil qui tape fort dès le milieu de matinée, les enfants peuvent chahuter des heures, sans jamais avoir froid, dans l’eau claire de la rivière tapissée de cailloux lisses. Le ruissellement paisible de l’eau est alors perturbé d’éclaboussures, de sauts dans la rivière dans des coins de faible profondeur, où l’on peut apercevoir quelques rocs noirs ou rougeâtres.

La vallée est à la fois pudique et ouverte aux regards des habitants : Creusée vers le cœur de l’île où elle s’enfonce à ne plus voir, elle est vallonnée et ascendante sur les côtés, jusqu’à une crête d’un vert plus foncé qui la délimite de l’est à l’ouest en arc de cercle. Sur ses plus vertes hauteurs, la vallée confronte le ciel et s’expose dignement à l’océan, il est impossible pour le riverain de ne pas la remarquer.

(...)

Il aime se promener, seul, ou avec son frère, le long de la rivière. Il aime la solitude et s’attarde parfois sur des détails : il s’assoit au bord de l’eau, observe des bulles qui viennent éclater à sa surface ; il touche, palpe, arrache des feuilles, observe les plantes, hume les fleurs et les fruits. La vallée étreint son innocence et attise sa curiosité, il s’y ressource, observe tout d’un œil attentif, écoute les sons de la nature, de la terre au ciel et du ciel à la terre, la vallée et l'enfant ne vivent plus l'un sans l’autre.

Quand l’occasion se présente et qu’il peut, dès l’aube, se fondre dans la flore, une toile d’araignée tissée dans un rayon du soleil attise sa curiosité, la finesse de la soie se marie à la rosée, sur une de ces feuilles immenses et tropicales qui peut vous abriter en cas de forte pluie.

C’est un entre-deux-mondes gorgé d’une beauté sans prétention, d’émotions humaines et animales et d’une spiritualité intemporelle qui se dissimule dans la brousse. L’enfant aime s’y promener, ses pieds nus s’enfoncent dans une terre brune ou rouge, poudrée ou boueuse, noire et fibreuse, il se plaît dans cet univers isolé, cousu de paradoxes, mystique et concret, forestier et vallonné, il s'y promène jusqu’à ce que ce monde fasse partie de lui et ne le quitte jamais.

Retour à l'accueil